Qui a eu cette idée folle, un jour, de proposer au conseil municipal de Saint-Jean-de-Boiseau des chimères à l’effigie de Guizmo, d’un Gremlins et de Goldorak pour orner la Chapelle de Bethléem ? Ces fameuses chimères qu’Estuaire a choisi de mettre en valeur cette année avec une installation sonore de Gino de Dominicis… C’est Jean-Louis Boistel, 55 ans, dont 37 ans en tant que tailleur de pierres et sculpteur. L’homme a aujourd’hui élu domicile à Orvault, c’est là qu’il a installé son cabinet, le cabinet Boistel Conseil, spécialisé dans la restauration du patrimoine historique.

L’histoire commence en 1993 : l’architecte des Bâtiments de France, Gwénolé Congard, cherche un tailleur de pierres pour restaurer les chimères de la Chapelle de Bethléem, une petite chapelle du 15e siècle. Le bâtiment est classé à l’inventaire des monuments historiques. La mission est donc confiée à Jean-Louis Boistel, homme d’expérience, qui en a vu d’autres : il a déjà travaillé sur des chantiers majeurs du département : le Château des ducs de Bretagne, la Cathédrale de Nantes, la Chapelle de l’Oratoire, le Château de la Gascherie, le Château de Blain, etc.

Mais pour la Chapelle de Bethléem, il est non seulement chargé de réaliser les futures chimères mais aussi de les imaginer ! C’est ce qu’on appelle un “programme iconographique”. Un vrai privilège : rares sont les tailleurs de pierres à pouvoir laisser libre cours à leur créativité dans le cadre d’une restauration… Jean-Louis Boistel relève le défi avec enthousiasme et se lance dans une étude complète du site.

Des chimères d'origine, il ne reste rien si ce n’est un vague dessin du 19e siècle. En se penchant sur l’histoire du lieu, l’artisan découvre que la Chapelle de Saint-Jean-de-Boiseau est dédiée à Notre Dame de Bethléem, vierge de la nativité : en quelque sorte, une ode à la naissance, à la vie à la mort, une invitation à la purification. Jean-Louis Boistel et l’architecte des Bâtiments de France sont d’accord : il faut respecter l’esprit du site et créer de nouvelles chimères de type médiéval, mais inspirée par la mythologie contemporaine.

C’est ainsi que Jean-Louis Boistel envisage de restaurer les 28 chimères de la chapelle. 3 d’entre elles sont particulièrement... audacieuses. Elles représentent :
. Guizmo : C’est le bon monstre que tout à chacun possède en lui et qu’on laisse à la porte de la Chapelle pour se purifier. Un monstre gentil, sympa, mignon mais attention : l’homme doit prendre des précautions au risque que le bon monstre n’engendre un mauvais démon incontrôlable…
. Un Gremlins : Justement : le mauvais démon engendré par le bon démon. Pas vraiment cruel, il n’en est pas moins destructeur, car franchement bête : il plagie tous les travers de l'homme de façon excessive. Exemple : il ne fume pas une cigarette, mais 15, ne boit pas un verre, mais 15... Il fait peur car il n'a pas de limites.
. Goldorak : C’est la figure représentative de Lancelot du Lac, le premier grand chevalier du Moyen Age, défenseur de l’humanité. Contrairement à ce que l’on pense (souvenez-vous du dessin animé des années 80 !), Goldorak n’est pas un robot mais une armure que seul un cœur pur peut manœuvrer.

Lorsque Jean-Louis Bostel présente son projet en conseil municipal, il recueille des réactions positives, excepté du côté de l’opposition, à priori choquée par l’interprétation du tailleur de pierres. Résultat : un débat public est organisé à Saint-Jean-de-Boiseau et la polémique sera finalement dissipée grâce à l’intervention des jeunes de la commune, séduits par le projet de Jean-Louis Boistel, auquel ils peuvent s’identifier.

Plus de deux ans de travail – et beaucoup de sueur ! - ont été nécessaires et c’est en septembre 1995 que Jean-Louis Boistel et son équipe achèvent les 28 chimères qui ornent désormais les contreforts de la Chapelle de Bethléem, dont le « Pinacle de l’Inconscient » et ses fameux Guizmo, Gremlins et Goldorak qui ont tapé dans l’œil des jeunes Boiséens… Et de l’équipe de programmation d’Estuaire ! Une belle histoire menée de mains de maître.

Pour aller plus loin, rendez-vous sur le site de Jean-Louis Boistel : http://boistelconseil.free.fr

“D’Io” de Gino de Dominicis, à découvrir sur le site de la Chapelle de Bethléem à Saint-Jean-de-Boiseau, du mardi au dimanche de 12h à 19h jusqu’au 16 août inclus.


*Chimères ou gargouilles ?
Les gargouilles ne désignent que les extrémités des conduits d'écoulement des eaux, alors que les chimères sont des statues fantastiques et diaboliques qui ont une fonction purement décorative. Elles ont, comme les gargouilles, l'aspect d'animaux fantastiques et effrayants. Elles représentent des créatures malfaisantes, qui penchées vers le sol, semblent se repaître du spectacle des turpitudes de l'humanité. Les chimères ornent une série d'édifices médiévaux, comme la Chapelle de Bethléem (merci Wikipédia !).


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