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Gilles Clément

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Gilles Clément n’est pas seulement paysagiste, botaniste, entomologiste, penseur, écrivain, enseignant à l’École supérieure du paysage de Versailles, anthropologue écolo-humaniste, il est avant tout jardinier : « Le jardin planétaire déclare le territoire comme un lieu de pluralité des pensées et des actions tout comme il reconnaît une infinité de jardinages intégrant la complexité du vivant. »

À partir des concepts de jardin planétaire, jardin en mouvement et tiers-paysage, il réinvente une manière d’être pour l’homme en relation avec son environnement. Idéaliste, le militant Gilles Clément théorise son concept de « tiers-paysage », né d’une commande d’observation de l’île au Centre international d’art et du paysage de Vassivière-en-Limousin. Celui pour qui le « désordre fait la diversité » réhabilite l’idée de nature dans sa plus grande liberté, laissant surgir des formes de l’inattendu, où la fragilité se conjugue à la rareté, la banalité à l’indépendance. La diversité est au cœur de sa conception du jardin où se lient herbes folles et arbres oubliés, plantes délaissées et flore des friches abandonnées, où les saisons redessinent un biotope, un lieu de vie, à chaque année renouvelé. « La diversité est soumise à l’évolution, aujourd’hui orientée par l’activité humaine et jugée en péril. Le brassage planétaire est le résultat d’une agitation incessante des flux autour de la planète : vents, courants marins, transhumances animales et humaines, par quoi les espèces véhiculées se trouvent constamment mélangées et redistribuées. » Observer pour agir et faire avec, au sens de collaborer avec les énergies en place, cela radicalise sa méthodologie pour une application concrète du concept d’hétérotopie1 de Michel Foucault, telle la localisation physique de l’utopie, un espace concret qui héberge l’imaginaire, comme une cabane d’enfant, un jardin ou un théâtre.

Le parc André-Citroën, le domaine de Rayol, l’abbaye de Valloire, le château de Blois ou les jardins de l’Arche comptent parmi ses réalisations. L’homme est engagé. Politiquement, il refuse après l’élection de Nicolas Sarkozy de répondre aux commandes de l’État pour des raisons d’incompatibilité entre sa logique et celle, capitaliste, du gouvernement, et développe le nouveau concept de jardin de résistance. Dans la lignée de l’écrivain agriculteur d’origine algérienne Pierre Rabhi2, un des pionniers de l’agriculture biologique, défenseur des expériences de microcrédit ou de désobéissance civile, Gilles Clément transmet l’idée que le monde est un jardin… autant politique qu’esthétique.
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Notes
1. Michel Foucault, conférence de 1967, « Des espaces autres », in Dits et écrits, Paris, Gallimard, 1984.
2. Pierre Rabhi, Manifeste pour la terre et l’humanisme, pour une insurrection des consciences, Paris, Actes Sud, 2008.

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Photo © Stéphane Bellanger
Portrait © Mai Tran – Revue 303 n° 106, “Estuaire, le paysage l’art et le fleuve”, 2009


POUR ESTUAIRE, GILLES CLÉMENT SIGNE LE JARDIN DU TIERS-PAYSAGE